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Ovariectomie chez la chienne

Une remise en question

Résumé

L’ovariectomie est l’intervention chirurgicale la plus courante en médecine vétérinaire.
Conventionnelle ou vidéo-assistée, de multiples techniques sont utilisées pour limiter les complications (hémorragique et algique en particulier).
Mais la question d’une stérilisation systématique doit se poser compte tenu des récentes publications sur son implication dans certains cancers (tumeurs mammaires, hémangiosarcomes, mastocytomes) ou maladies ostéo-articulaires (RLCA).

Auteur : Dr. A. Gautherot 01-01-2014
Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers, 29 avenue du Maréchal Joffre, 77100 Meaux.
E-mail : agautherot@chvcordeliers.com
Mots clefs :
Cet article a été publié dans : PratiqueVet (2014) 49 : p 494-497

L’ovariectomie chez la chienne remise en question

La stérilisation de la chienne est réalisée couramment en médecine vétérinaire. Il est possible d’effectuer une ovariectomie seule ou associée à une hystérectomie (OVH).
Que cela soit par laparotomie ou laparoscopie, avec une ligature des pédicules vasculaires ou une fusion tissulaire, puis une suture cutanée ou l’emploi de colle chirurgicale : les techniques sont multiples.

La stérilisation de convenance permet d’éviter les chaleurs et les gestations indésirables. On en attend également une prophylaxie vis-à-vis des pyomètres ainsi que des tumeurs ovariennes et mammaires.

Objectifs pédagogiques

Être capable d’adapter son discours au propriétaire ainsi que sa technique chirurgicale en tenant compte des dernières informations scientifiques disponibles.

Crédit de formation continue

La lecture de cet article ouvre droit à 0,05 CFC. La déclaration de lecture, individuelle et volontaire, est à effectuer auprès du CNVFCC.

À quel âge doit-on proposer la stérilisation chez la chienne ?

Le moment auquel la stérilisation doit être envisagée est controversé puisque celle-ci s’accompagne d’effets bénéfiques ou néfastes qui varient en fonction de l’âge et de la race. Aucun consensus n’est donc établi à ce jour.

Dans la pratique, il semble que ce soit l’expérience du vétérinaire ou la situation de l’animal (en refuge ou en famille, en bonne santé ou malade) qui détermine le moment de la stérilisation [1].

Ovariectomie seule ou ovariohystérectomie ?

Il a été montré qu’il n’existe aucune différence significative entre les taux de complication à long terme de l’ovariectomie par rapport à l’OVH (notamment risque d’endométrite, de pyomètre ou d’incontinence urinaire) [2].

Les durées d’intervention et les complications à court terme (en particulier le risque hémorragique et la douleur postopératoire) ont également été étudiées et là encore, aucune différence significative n’est identifiée [3]. Enfin -pour un chirurgien inexpérimenté- la taille de l’incision abdominale ne diffère pas de manière significative [3]. L’ovariectomie constitue donc une alternative à l’OVH.

Quels sont les intérêts et les inconvénients de l’abord cœlioscopique ?

L es avantages de la laparoscopie, en comparaison avec les interventions par laparotomie, sont clairement établis en médecine humaine : douleur moindre, récupération plus rapide, taux de complication inférieur, durée d’hospitalisation plus courte [4].

Les mêmes avantages sont observés en médecine vétérinaire et en particulier dans le cadre de la stérilisation de la chienne [4,5].

Par ailleurs, cet abord présente l’avantage de proposer lors du même temps chirurgical la réalisation d’une gastropexie préventives chez les races à risque [6].

Les inconvénients relatifs de cet abord sont la nécessité de se former à la technique, d’acquérir le matériel coûteux et enfi n de disposer d’un aide chirurgical.

Citons également que le temps chirurgical est augmenté pour un chirurgien inexpérimenté (mais diminue rapidement avec l’expérience) [4].

Quelles sont les différentes possibilités d’hémostase du pédicule ovarien ?

Anatomiquement, les ovaires sont localisés caudalement aux reins. Le ligament large, ou mesovarium, attache l’ovaire dorso-latéralement à la paroi abdominale et contient les vaisseaux utéroovariens.

Crânialement, il contient le ligament suspenseur de l’ovaire qui s’attache à la dernière côte.

Caudalement, il devient le ligament propre de l’ovaire qui s’attache à l’extrémité crâniale de chaque corne utérine.

La vue laparoscopique permet d’identifier la corne utérine (flèche pointillée blanche), la bourse ovarique (flèche pleine blanche), le mesovarium contenant le pédicule ovarien (flèche pointillée jaune), et le ligament suspenseur de l’ovaire (flèche pleine jaune) (Photo 1).

Photo 1

Mise en évidence de la corne utérine (flèche pointillée blanche), la bourse ovarique (flèche pleine blanche), le mesovarium contenant le pédicule ovarien (flèche pointillée jaune), et le ligament suspenseur de l’ovaire (flèche pleine jaune).

Photo 2

Électrocoagulation monopolaire : l’électrode active est dans le site chirurgical alors que l’électrode de retour (ou plaque électrochirurgicale) est sous le patient. Le courant traverse le patient et complète le circuit de l’électrode active vers l’électrode de retour. Ce mode d’électrochirurgie permet à la fois la coagulation et la section. Son inconvénient majeur est le risque de brûlure accidentelle des tissus adjacents.

Photo 3

Electrocoagulation bipolaire : les fonctions d’électrodes actives et de retour sont toutes deux accomplies sur le site chirurgical. Les deux extrémités de la pince jouent le rôle d’électrode active et de retour, et le tissu saisi est inclus dans le circuit électrique. Cela réduit le risque de brûlure accidentelle.
Pour un même résultat d’hémostase qu’en monopolaire, un courant moins important est requis, réduisant d’autant le risque d’arc électrique. Le principal désavantage du bipolaire est l’absence de section.

Photo 4

Fusion tissulaire au LigaSure. Suivant le principe de la coagulation bipolaire, le LigaSure délivre un courant d’intensité élevée et de faible voltage. D’où une élévation thermique entre ses mors et dénaturation des protéines de la paroi vasculaire. De plus, les parois des vaisseaux qui fusionnent sont écrasées par les mors de la pince, ce qui finit d’occlure leur lumière.
Le générateur mesure l’impédance et la résistance au contact de l’électrode et arrête automatiquement de délivrer l’énergie une fois la fusion atteinte. Ce système est utilisable sur des vaisseaux allant jusqu’à 7 mm de diamètre.

Plusieurs méthodes sont décrites pour réaliser l’hémostase du pédicule ovarien.

Citons par exemple la suture extracorporelle, l’utilisation d’hémoclips laparoscopiques, le laser, l’électrocoagulation mono- ou bipolaire (Photos 2 et 3) ou encore la fusion tissulaire (bipolaire (Photo 4) ou harmonique).

Selon une étude de 2007, lors d’un abord laparoscopique l’utilisation de la fusion tissulaire permet d’obtenir un temps chirurgical significativement plus court tout en procurant une excellente hémostase [7].

Une analgésie locale est-elle utile ?

La stérilisation de la chienne permet de diminuer le risque de tumeur mammaire”. “La stérilisation de la chienne avant son premier œstrus permet d’éviter le risque de tumeur mammaire”.

Ce sont là deux arguments couramment distribués aux propriétaires pour les convaincre d’opérer leurs animaux.

Et pourtant… En 2012, une publication réalise l’état des lieux de nos connaissances sur l’incidence de la stérilisation sur le risque de tumeur mammaire en étudiant près de 10000 articles publiés
sur le sujet [9].

Il en ressort un sérieux manque de preuve ainsi que la présence de biais qui ne permettent pas d’établir de recommandations fermes et sans appel.

Quid de la stérilisation concomitante à l’ablation d’une tumeur mammaire ?
Une étude de 2013 met en évidence la réduction par 50 % du risque de récidive lorsque la stérilisation est réalisée simultanément à l’exérèse d’une tumeur mammaire bénigne.

Bien qu’aucune information ne soit disponible pour les chiennes présentant des tumeurs malignes, la stérilisation adjuvante doit être systématiquement recommandée en cas de traitement chirurgical de tumeur mammaire chez la chienne adulte [10].

Quels sont les autres effets sur la santé ?

L es œstrogènes jouant un rôle dans la satiété chez la chienne, la stérilisation favorise l’augmentation de l’appétit. La prise de poids, allant parfois jusqu’à l’obésité, est donc un fait fréquemment
rapporté.

L’instauration d’un régime alimentaire approprié est donc indispensable.

La prévalence de l’incontinence urinaire due à une insuffisance sphinctérienne urétrale est 100 fois plus élevée chez la chienne stérilisée que chez la chienne entière (20 % vs 0,2 %).

La faible concentration en œstrogène est impliquée même s’il existe d’autres facteurs prédisposants (tels que la race, le poids ou la position pelvienne de la vessie).

Enfin, il est constaté que certains troubles ostéo-articulaires et cancers sont plus représentés chez les animaux stérilisés (mâles et femelles confondus).

Compte tenu de cette observation, une étude rétrospective américaine s’est concentrée sur la comparaison des prévalences de la dysplasie des hanches, de la rupture du ligament croisé antérieur
(RLCA), du lymphome, de l’hémangiosarcome (HSA) et du mastocytome chez le Golden Retriever (race très représentée aux États-Unis), stérilisé ou non et âgé de 1 à 8 ans [11].

Dans les cohortes étudiées, aucune chienne entière n’a présenté de RLCA quand près de 8 % des chiennes stérilisées avant l’âge de 12 mois y sont sujettes.

D’autre part, la prévalence d’HSA est 4 fois plus élevée chez la chienne stérilisée après 1 an que chez la chienne intacte ou stérilisée avant l’âge d’un an.

Enfin, alors qu’aucun cas de mastocytome n’est répertorié dans le groupe des femelles entières, la prévalence de ce cancer est proche de 6 % chez la chienne stérilisée après 1 an.

L’ensemble de ces éléments doit donc être considéré avant de décider “si” et “quand” la chienne doit être stérilisée, en particulier pour les Golden Retrievers.

Mémo

  • Aucun consensus ne détermine l’âge idéal de la stérilisation de convenance.
  • L’ovariectomie est une alternative à l’OVH.
  • L’ovariectomie vidéo-assistée présente des avantages, mais nécessite du matériel et une courbe d’apprentissage.
  • La fusion tissulaire est, à ce jour, la technique d’hémostase du pédicule ovarien qui présente les meilleurs résultats.
  • Une analgésie locale module la profondeur de l’anesthésie et limite l’utilisation d’antalgiques systémiques.
  • Il n’y a aucune preuve scientifique de la prévention des tumeurs mammaires par la stérilisation.
  • Néanmoins, l’ovariectomie en thérapie adjuvante d’une mastectomie en réduit le risque de récidive.
  • La prise de poids et l’incontinence urinaire sont des complications fréquentes.
  • Les Golden Retrievers stérilisées sont plus sensibles aux RLCA, HSA et mastocytome que les non-stérilisées.

À lire…

  1. Clark K. Neutering : how early is too early ? WSAVA/FECAVA/BSAVA Congress report. Vet Rec. 2012 ; 170 : 432-3.
  2. Van Goethem B et coll. Making a rational choice between ovariectomy and ovariohysterectomy in the dog : a discussion of the benefi ts of either technique. Vet Surg. 2006 ; 35 : 136–43.
  3. Peeters M. E, Kirpensteijn J. Comparison of surgical variables and short-term postoperative complications in healthy dogs undergoing ovariohysterectomy or ovariectomy. J Am Vet Med Assoc. 2011 ; 238 : 189-95.
  4. Gowser S, Mayhew P D. Canine laparoscopic and laparoscopic-assisted ovariohysterectomy and ovariectomy. Compend Contin Educ Pract Vet. 2008 ; 30 : 430-40.
  5. Gauthier O et coll. Assessment of postoperative pain in cats after ovariectomy by laparoscopy, median celiotomy, or fl ank laparotomy. Vet Surg. 2014 ; Jan 31. doi : 10.1111/j.1532-950X.2014.12150.x. [Epub ahead of print].
  6. Rivier P et coll. Combined laparoscopic ovariectomy and laparoscopic-assisted gastropexy in dogs susceptible to gastric dilatation-volvulus. Can Vet J. 2011 ; 52 : 62-6.
  7. Mayhew PD. Comparison of three techniques for ovarian pedicle hemostasis during laparoscopic-assisted ovariohysterectomy. Vet Surg. 2007 ; 36 : 541-7.
  8. Young KK et coll. Sprayed intraperitoneal bupivacaine reduces early postoperative pain behavior and biochemical stress response after laparoscopic ovariohysterectomy in dogs. The Vet J. 2012 ; 191 : 188-92.
  9. Beauvais W et coll. The effect of neutering on the risk of mammary tumours in dogs – a systematic review. J Small Anim Pract. 2012 ; 53 : 314-22.
  10. Kristiansen V M et coll. Effect of ovariohysterectomy at the time of tumor removal in dogs with begnin mammary tumor and hyperplastic lesions : a randomized controlled clinical trial. J Vet Intern Med. 2013 ; 27 : 935-42.
  11. Torres de la Riva G et coll. Neutering dogs : effect on joint disorders and cancers in Golden Retrievers. PLoS On. 2013 ; 8 : e55937.
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