Le SDTE est une affection à laquelle les chiens de grand ou très grand format (Irish wolfhound, dogue allemand, St Bernard…) sont prédisposés. Les origines de ce syndrome sont encore mal connues. Le taux de mortalité est important. Il est compris, selon les auteurs, entre 13,5 % et 80 %.
Le pronostic est plus réservé en cas de volvulus que lors de dilatation simple1. La pexie de l’estomac est la seule technique recommandée permettant d’éviter sa torsion ou ses récidives. En effet un traitement médical uniquement montre une récidive de 76 % et un taux de mortalité de
80 %1.
Si la nécessité d’avoir recours à un geste chirurgical est indiscutable il n’existe pas de consensus sur le moment le plus opportun pour l’effectuer. Certains le réalisent en urgence alors que d’autres recommandent de le différer. A ce jour, aucune étude n’a permis de comparer les taux
de morbidité et de mortalité entre une gastropexie effectuée en urgence et une gastropexie effectuée de manière différée. Cependant, des études récentes, effectuées en médecine vétérinaire et humaine, semblent considérées que différer le geste chirurgical afin d’améliorer les conditions opératoires, apportent un meilleur taux de survie2, 3.
La réanimation médicale correspond au traitement de l’état de choc dont la composante principale est l’hypovolémie relative. Elle est basée sur l’administration d’O2, de fluides (cristalloïdes, colloïdes de synthèse et/ou hypertonique) et d’antalgiques. Le sondage gastrique qui permet la décompression de l’estomac est indispensable et fait partie intégrante de la réanimation. Une équipe a récemment montré l’intérêt pronostique des dosages répétés de la lactatémie. Les chiens dont la lactatémie avait diminué de 42,2 % avec la mise en place des soins de réanimation ont présenté un taux de survie de 100 %. A l’inverse, le groupe dont la lactatémie avait présenté une diminution inférieure à 42,2 % a présenté un taux de survie de 56 %4.
Le sondage gastrique doit être réalisé précocement afin de décomprimer l’estomac. Cette décompression est primordiale pour diminuer la pression appliquée sur la veine cave caudale et favoriser le retour veineux, reperfuser la paroi stomacale, améliorer la ventilation et traiter la douleur5. Suivant l’état clinique de l’animal, le sondage est réalisé avec ou sans anesthésie. Dans notre cas, l’état d’agitation de l’animal ne nous permettait pas d’effectuer cet acte sans tranquillisation et anesthésie générale. La sonde peut être remplacée par une sonde de pharyngostomie ou par une sonde naso-gastrique. Ceci permet d’éviter les récidives de dilatations de l’estomac. La réanimation médicale est alors prolongée et le geste chirurgical différé.
L’objectif d’une gastropexie est de produire une adhérence permanente entre l’antre pylorique et la paroi abdominale droite sans altérer la fonction gastrique. Il existe une grande variété de techniques laparotomiques (tube de gastropexie, gastropexie circumcostale, incisionnelle…). Récemment, plusieurs techniques chirurgicales laparoscopiques ont été expérimentées dans ce but. Elles possèdent tous les avantages de la coeliochirurgie : magnificence et apport de lumière, réduction du traumatisme tissulaire et de la douleur donc de la durée d’hospitalisation. Une conversion en laparotomie reste toujours possible. Des études expérimentales ont montré que la résistance à la tension de la pexie réalisée sous cœlioscopie, l’histologie de l’adhérence et les fonctions gastriques étaient comparables aux autres techniques chirurgicales laparotomiques6.
La technique de gastropexie réalisée ici est une application de celle décrite par Rawlings en 2002 pour la gastropexie préventive7,8. Elle est rapide et ne nécessite que peu de matériel. Les sutures sont réalisées à l’extérieur de l’abdomen ce qui permet un apprentissage plus accessible comparé aux autres techniques décrites uniquement intraabdominales9,10.
La morbidité et la douleur postopératoire sont réduites6.
En effet, 2 incisions de 1 et 3 cm sont pratiquées par rapport à une laparotomie classique avec une incision de 10-15 cm.
Lors de dilatation simple, comme dans ce cas, l’estomac est en position physiologique. La majorité de la paroi peut être visualisée à la recherche de zone de nécrose. La couleur, l’épaisseur, la présence d’ondes péristaltiques et le saignement sont évalués. En cas de torsion, le pylore est recherché en position dorsale droite et peut être saisi par la pince à préhension et replacé en position physiologique sous contrôle visuel. La rate et les artères spléniques sont inspectées. Une congestion splénique est classique et la rate doit revenir à une taille subnormale une fois la torsion traitée. La présence d’infarcissement de la paroi stomacale ou de thrombose des artères spléniques requiert un traitement chirurgical supplémentaire et l’intervention est convertie en laparotomie classique5.
En conclusion, lors de SDTE, la réanimation médicale a pour but de traiter l’état de choc et la compression de la veine cave caudale. Ceci permet de diminuer les risques anesthésiques et améliore le pronostic. La possibilité de laisser en place une sonde gastrique qui évite les récidives de dilatations autorise le différé de l’intervention chirurgicale tout en continuant la réanimation médicale et la surveillance des grandes fonctions.
Les techniques de gastropexie par laparoscopie sont applicables dans les cas de SDTE et donnent des résultats équivalents à la laparotomie. La morbidité post opératoire est réduite en raison de l’abord mini-invasif de la cavité abdominale. Lors de doute sur l’intégrité de la paroi stomacale ou d’une thrombose splénique, une conversion en laparotomie est réalisable rapidement.